28 octobre 2006

01 Octore 1969 : L'Embuscade.

Ce Post est la suite du précédent : 29.09.69 , même si ce n'est pas apparent sur le blog.


L'Embuscade.

A l’époque de la naissance de François-Régis j’étais militaire, au CIT 156, Centre d’Instruction du Train, à Fontainebleau. Aux jeunes recrues nous apprenions pour l’essentiel à conduire des camions et des jeeps, à défiler au pas cadencé et à tirer au fusil. Un peu de sport, des rudiments de combat à pied, venaient compléter l’instruction militaire que nous dispensions à de jeunes appelés du contingent renouvelés tous les deux mois.

Le Train des équipages, créé par Napoléon, n’est pas une arme très guerrière mais par contre très technique. Ses missions essentielles s’articulent autour du transport de ravitaillement et de la circulation routière militaire.

Dans les guerres coloniales les convois de camions sont très exposés, donc nous enseignions, autant que faire se peut, la conduite à tenir face aux actions de guérilla.
Mais ça ne m’a servi à rien : l’embuscade avait été vraiment bien préparée et quand je suis tombé dedans la surprise a été totale.

Tous les soirs, la journée de travail finie, je me changeais rapidement, je sautais dans la deux chevaux et je fonçais lentement vers la clinique-maternité rendre visite à Danielle. J’arrivais peu avant la fin des visites et je repartais toujours le dernier. C’est d’ailleurs ça qui m’a rendu vulnérable.

Le Mercredi soir, j’ai quitté la chambre de Danielle vers vingt heures quarante sept, j’ai parcouru le couloir, franchi la porte battante qui mène aux ascenseurs et au bureau du personnel soignant. C’est là qu’elles m’attendaient. J’ai encore fait deux pas sur ma lancée et la chef du commando m’a bloqué le passage, les deux autres se sont disposées de façon à m'interdire les voies de retraite et d'accès aux autres issues : toute fuite impossible, imparable.

{{ Il s’est jugé perdu puisqu’il était surpris,
Sa retraite coupée et tous ses chemins pris…}}

Et ça a été le mitraillage en règle, à bout portant :
« - D’abowd l’heuwe de la fin des visites, elle est lawgement dépassée. Et puis suwtout vous devez êtwe un joli monsieur, vous venez tous les jouws et chaque fois que vous repawtez votwe femme elle pleuwe. C’est une honte, nous ne voulons pas savoiw ce que vous faites, mais si c’est pouw la faiwe pleuwer il vaut mieux ne plus veniw, une si gentille petite dame avec un si joli bébé ! ».

Elles n’avaient pas entièrement tort. Ces visites se déroulaient toujours un peu sur le même modèle : comment allait la jeune maman, admiration du bébé et de ses progrès quotidiens, nouvelles des différents visiteurs passés dans la journée, et puis, baby-blues aidant venait le moment, heureux au début, puis triste à la fin, où Danielle pensait et disait : « - C’est vraiment dommage que Papa soit parti brutalement, lui qui se réjouissait tellement d’être grand-père. Il l’attendait avec une si grande impatience l'enfant de sa Titi… ».

Et le temps passant, même en évitant de regarder l’heure, c’était le moment de partir. Elle se retenait le plus possible, mais pleurait quand même, en me disant des yeux ça va, tu peux y aller. Son papa chéri était décédé trois semaines plus tôt. J’ai expliqué ça aux trois "guerilleras". Elles ont été aussi confuses qu’elles avaient été déterminées, ne sachant comment faire amende honorable et ne tarissant pas d’excuses.

Après cet évènement j’ai pu rester tous les soirs jusqu'à vingt et une heure et elles ont toutes été aux petits soins pour Danielle… et François-Régis.

Encore Bon Anniversaire FR.

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